
La spirale inflationniste dans la zone euro a finalement été stabilisée l'année dernière après un cycle sans précédent de hausses des taux directeurs de la Banque centrale européenne (BCE). La séquence de resserrement la plus agressive de l'histoire de la BCE a porté le taux d'intérêt de référence à 4%, en réponse au choc inflationniste inédit post-Covid. Cette période a été suivie d'un statu quo de neuf mois, l'institution de Francfort a attendu jusqu'à ce que l'inflation se réduise vers l'objectif de 2%.
Les baisses de taux d'intérêt ont finalement débuté en juin dernier, à un rythme prudent, les responsables de la BCE étant convaincus de la diminution des pressions sur les prix. Le taux de dépôt a ainsi été ramené à 2%, un niveau globalement dans la « fourchette neutre », ce qui signifie que la politique monétaire n'est ni expansionniste ni restrictive. L'inflation oscillant récemment autour de 2%, la BCE doit désormais calibrer le taux terminal approprié. Selon les analystes de QNB, les perspectives macroéconomiques justifient deux baisses de taux supplémentaires cette année, trois facteurs clés sous-tendent cette opinion.
Premièrement, il existe une probabilité croissante que l'inflation soit nettement inférieure à l'objectif de 2% de la BCE. La dernière publication des prix à la consommation a fait état d'une inflation globale de 1,9 % en mai. De plus, la réduction des hausses de salaires atténuera encore davantage les pressions sur les prix dans le secteur des services à forte intensité de main-d'œuvre, qui affiche généralement une inflation très persistante.
Plus important encore, estiment l'équipe de QNB, les marchés signalent une baisse de l'inflation au cours de l'année à venir. Les instruments financiers peuvent fournir des informations utiles sur l'évolution attendue des variables macroéconomiques. Plus précisément, le taux swap euro-inflation révèle les anticipations d'inflation des investisseurs. Depuis le pic de 4,2% atteint début 2023, les anticipations d'inflation du marché suivent une tendance baissière, quoique irrégulière. Au cours des quatre derniers mois, les anticipations pour l'année à venir sont restées inférieures à l'objectif de 2%, après avoir atteint un creux de 1,2%. Ces anticipations de désinflation renforcent les craintes d'un éventuel dépassement de l'objectif par la BCE, ouvrant ainsi la voie à de nouvelles baisses de taux d'intérêt.
Deuxièmement, après avoir été au bord de la récession ces deux dernières années, la zone euro s'apprête à connaître une nouvelle période de croissance décevante. Les récentes publications de l'indice des directeurs d'achat (PMI) laissent entrevoir une stagnation des perspectives économiques. L'indice PMI composite, qui suit l'évolution conjointe des secteurs des services et de l'industrie manufacturière, est resté inférieur ou proche du seuil de 50 points séparant contraction et expansion depuis août dernier. La conjoncture pour le secteur manufacturier est particulièrement défavorable, l'indice PMI de l'industrie étant resté en contraction ces trois dernières années, dans un contexte de crise énergétique régionale, d'incertitude géopolitique et d'escalade des conflits commerciaux dans le monde. Dans ce contexte, le consensus des analystes, ainsi que les services de la BCE, prévoient une croissance du PIB réel de 0,9% cette année. Compte tenu des perspectives économiques moroses pour la zone euro, certains membres du Conseil des gouverneurs de la BCE ont plaidé en faveur de mesures de relance monétaire supplémentaires.
Troisièmement, la croissance du crédit dans la zone euro reste atone. Malgré l'important cycle de baisse des taux d'intérêt mis en œuvre par la BCE, les taux d'intérêt à long terme n'ont pas enregistré de baisse significative. Le taux des euro-obligations à 10 ans reste supérieur à 3% et est resté quasiment inchangé ces deux dernières années. Les taux d'intérêt à long terme sont essentiels pour l'économie, compte tenu de leur influence sur l'investissement des entreprises et la demande des ménages.
Globalement, malgré des pressions erratiques sur les prix à court terme et des alertes liées à la guerre tarifaire, QNB estime que la balance des risques continue de pencher davantage vers une faible croissance que vers les craintes d'inflation. La BCE pourrait ainsi procéder à deux baisses supplémentaires de 25 pb cette année, ramenant ainsi le taux d'intérêt des dépôts à 1,5%.
Themes :
© Copyright Tustex
Les articles associés
-
8
-
39
-
68
-
109